Le monde mystérieux et magnifique des lichens.
Écrit par Lauren Aarts, Coordinatrice de Conservation
Je n'oublierai jamais le jour frais et nuageux de septembre dernier lorsque j'avançais lentement à travers une forêt humide et marécageuse en pensant que cela allait être comme toutes les autres survey de lichens que j'avais faites. J'avais tort.
Alors que l'équipe et moi progressions à travers les flaques moussues, les buissons denses et le sous-bois couvert de fougères de la propriété du comté de Charlotte, nous gardions un œil ouvert pour tout signe du lichen rare et énigmatique étrangement nommé le lichen "bardeau froissé".
Mon cœur a bondi quand j'ai repéré le premier. Nous nous sommes mis au travail en enregistrant méticuleusement les détails du spécimen de la taille d'une paume. En regardant autour de moi, j'ai repéré un autre lichen, puis un autre, et encore un autre !
La plupart du temps, lors des surveys, j'ai de la chance de trouver un ou deux de ces rares organismes. Mais ce jour-là, les observations ne cessaient de s'accumuler alors que nous nous retrouvions au cœur de l'habitat le plus riche pour le lichen "bardeau froissé" que j'avais jamais rencontré.
C'était la journée au terrain la plus gratifiante que j'aie jamais eue, mais ce qui rendit la découverte encore plus excitante arriva un peu plus tard dans l'année, lorsque la Fondation pour la protection des sites naturels contribua à établir cette terre comme une zone protégée dans le cadre de l'initiative Patrimoine Naturel de la province.
À ce jour, je ressens une profonde fierté en sachant que cette grande colonie de lichens rares est à jamais protégée dans ce marais d'érables rouges. C'est juste un des résultats positifs du Projet de lichens à risque de la Fondation pour la protection des sites naturels.
Lancé en 2020, le projet vise à identifier et à rétablir deux espèces rares et menacées de lichens dans le bassin versant de Skutik (St. Croix) : le lichen de bardeau à bord blanc (Fuscopannaria leucosticta) et le lichen de bardeau froissé (Pannaria lurida). Vous seriez surpris d'apprendre que les lichens ne sont ni des plantes ni des animaux. Ce sont des organismes incroyablement complexes composés de deux parties : de champignons et d’algues.
C'est une idée fausse, et assez courante, que les lichens tuent ou nuisent aux arbres. En réalité, ils utilisent l'arbre uniquement pour une surface à -quelle vivre, obtenant tout ce dont ils ont besoin par la photosynthèse, la pluie et l'air.
Ils constituent un élément essentiel d'une forêt en santé car ils offrent un lieu de camouflage, de la nourriture pour d’autres organismes, des matériaux de nidification et des habitats pour de nombreuses espèces sauvages. Ils enrichissent également le sol lorsqu'ils meurent et sont aussi utilisés dans la médecine autochtone.
Les lichens sont tellement sensibles à la qualité de l'air et de l'eau qu'un déclin notable en nombre peut nous alerter d’une augmentation des niveaux de pollution et de pluie acide.
Peu importe combien j'en vois, c'est toujours excitant de repérer le lichen de bardeau à bord blanc, souvent trouvé reposant sur les troncs supérieurs des Cèdres de l'est.
Ce lichen noir écailleux avec des extrémités blanches et des taches oranges vives adore vivre dans les marais avec un sol humide et mousseux.
En revanche, le lichen de bardeau froissé préfère les forêts mixtes humides et élit domicile sur les troncs de frênes noirs, d'érables rouges et parfois de Cèdres de l'est. Ce lichen gris foncé est souvent de la taille d'une paume avec une surface fripée et les mêmes taches oranges vives.
Les zones humides boisées offrent une abondance de microclimats et de microhabitats parfaits pour les lichens et d'autres espèces rares. Des observations notables lors de nos études de lichens incluent la belle Cypripède acaule (Cypripedium reginae) et la paruline du Canada menacée (Cardellina canadensis).
Les zones humides sont elles-mêmes également très importantes, en contribuant à atténuer les inondations, améliorer la qualité de l'eau potable et stocker le carbone responsable du changement climatique dans les arbres, les plantes du sous-bois et le sol.
Ces habitats deviennent de plus en plus rares dans notre province en raison de la coupe à blanc. C'est une mauvaise nouvelle pour les lichens en particulier car, une fois que leur habitat est perturbé, il est peu probable que ces organismes sensibles se rétablissent.
C'est là où notre projet entre en jeu. Nous avons déjà établi deux réserves naturelles abritant des habitats de lichen rares, travaillons sur une troisième cette année, et les données que nous recueillons seront utilisées pour élaborer des stratégies de rétablissement pour les populations de lichens nouvellement découvertes.
Un autre objectif est d'aider nos amis et alliés de la Première Nation Peskotomuhkati à Skutik (Passamaquoddy Recognition Group) à planifier et à réaliser des projets similaires. Cela implique soutenir les efforts de la Première Nation Peskotomuhkati pour protéger leur territoire traditionnel et établir des zones protégées et conservées autochtones (ZPCA).
Beaucoup d’habitats nécessaires à ces lichens menacés se trouvent dans des petites forêts privées, donc nous comptons sur nos liens avec les Néo-Brunswickois passionnés par la préservation des terres.
À ce jour, nous avons établi des liens avec plus de 50 personnes dont les terres présentent un lieu potentiel d'habitat important des lichens.
Après avoir obtenu la permission du propriétaire, nous visitons leur propriété à la recherche de lichens et d'autres espèces rares que nous pouvons trouver, en enregistrant les observations, les caractéristiques de l'habitat et tout signe de perturbation.
Parfois, nous avons la chance et le plaisir de marcher à travers la propriété avec les propriétaires, c’est très spécial d’apprendre avec des gens qui ont une connexion personnelle avec la terre.
Je me souviens d'une journée où je marchais avec une femme dont le terrain était dans sa famille depuis des générations. Elle connaissait profondément l'histoire de la terre mais était toujours si excitée d'apprendre que sa forêt était encore plus spéciale qu'elle ne le pensait.
Je me souviens surtout de ses yeux qui s'illuminaient lorsque je lui montrais les lichens rares qui habitaient la propriété.
"J'ai dû passer à côté de ceux-ci tant de fois sans savoir qu'ils étaient quelque chose d'aussi important !" s'exclama-t-elle. J'adore rencontrer des gens qui sont aussi enthousiastes que moi au sujet des lichens !
À l'occasion excitante où nous trouvons un lichen rare, nous recueillons des informations sur son emplacement et son habitat et notons soigneusement les menaces immédiates ou prévisibles de sa survie. Nous travaillons en collaboration directe avec un expert en lichens au musée du Nouveau-Brunswick pour confirmer l'identification.
Nous accueillons également les propriétaires intéressés à participer à notre programme de partenariat pour la conservation, une initiative qui fournit des ressources et des conseils aux propriétaires fonciers qui veulent apprendre comment ils peuvent gérer leur terrain pour mieux préserver son habitat unique, ses zones sensibles et ses espèces rares.
Nous fournissons aux propriétaires intéressés une description des espèces que nous avons trouvées sur leur propriété, une carte mettant en évidence les zones d'importance pour la conservation de l'habitat des lichens, et des suggestions pour aider à préserver toute espèce rare et son habitat.
C'est toujours gratifiant de se connecter avec les Néo-Brunswickois qui se soucient tellement de la biodiversité et des écosystèmes sains et qui veulent faire leur part pour la conservation.
Je suis fier de contribuer à une cause qui aide à protéger des habitats et des espèces aussi importantes en danger, et j'ai certainement acquis une nouvelle appréciation pour le monde étrange et merveilleux des lichens.
Ce projet a été possible grâce au support de Fonds de Fiducie de la faune du N.-B.